GROUPE SOS – La solidarité comme cœur de métier

  • 7 décembre 2020
  • Aurelie Sykes-Darmon
  • 9 min read

Nicolas, vous êtes porte-parole et dirigeant GROUPE SOS depuis 2000. Bon anniversaire, j’imagine que vous avez fêté vos 20 ans au sein du groupe en cette année une peu particulière et très “challengeante” pour la communauté internationale !

 Pouvez-vous revenir sur les activités du GROUPE SOS depuis 20 ans et nous expliquer et comment fonctionne le groupe ?

Nous sommes comme un groupe de sociétés, sauf que chez nous le statut associatif est à la base de tout. Cela veut dire que nous n’avons pas d’actionnaires. Nous créons ou accueillons des activités liées à l’intérêt général. Regroupés nous sommes plus forts pour pérenniser et développer les activités de chacun de nos 550 établissements au sein desquels travaillent plus de 20 000 personnes. 

Nous avons fait du biomimétisme sans le savoir : notre organisation s’inspire beaucoup du banc de poissons ou de la nuée d’oiseau. Chacun vit sa vie – dispose d’une autonomie importante – mais nous sommes capables d’agir de concert lorsque c’est nécessaire. 

Faire partie d’un groupe comme le GROUPE SOS rassure les partenaires bancaires et les pouvoirs publics, c’est une vraie force. Et puis on parle beaucoup d’innovation aujourd’hui. Et l’innovation vient souvent de la confrontation positive entre des expertises et des points de vue différents. Nous avons 200 métiers au sein du groupe. Par exemple lorsqu’une directrice de crèche croise lors d’une journée des équipes des salariés qui travaillent sur la question du handicap, naît quelque temps plus tard un dispositif qui permet d’accueillir ensemble des jeunes enfants valides et des jeunes enfants en situation de handicap, ce qui n’existait nulle part. Nous sommes tous tournés vers l’innovation au service de l’intérêt général.

Lorsque l’on se rend sur le site du GROUPE SOS, pour en savoir plus sur l’histoire du Groupe et sa raison d’être, la 1ère phrase qu’on lit est :

“ La recherche permanente de réponses innovantes et adaptées aux nouveaux besoins économiques, sociaux et environnementaux a nécessité une diversification massive des activités du GROUPE SOS. Cette évolution constante de ses activités a engendré une culture de l’adaptabilité de son organisation sociale et entrepreneuriale.”

Peut-on lire entre les lignes et en déduire que l’innovation est une constante pour le GROUPE SOS ? Que le groupe se base sur sa capacité à se réinventer pour répondre aux enjeux sociétaux évolutifs qui caractérisent ces dernières décennies ?

Le GROUPE SOS vient de la lutte contre les exclusions (hébergement d’urgence, soin, logement pour personnes et familles en situation de précarité ; accompagnement d’enfants et adolescents en difficulté ; soin de personnes en situation de handicap ; lutte contre les addictions…). Ce sujet est encore très présent aujourd’hui et il est central dans notre philosophie d’action, il guide nos pas. 

Nous gérons aujourd’hui aussi des Ehpad, des hôpitaux, des crèches, des équipements culturels, mais aussi des entreprises commerciales (restauration, bâtiment…). A chaque fois nous nous demandons comment on peut insuffler plus de solidarité dans ces dispositifs, pour prévenir les situations d’exclusions. Dans nos Ehpad les plus riches paient un peu plus pour que les plus pauvres disposent d’une qualité de service identique. Nos entreprises commerciales sont des entreprises d’insertion, c’est à dire qu’une partie de leurs équipes étaient en rupture avec le monde professionnel (chômeurs de longue durée, jeunes sans formation…). 

Nous nous remettons en question constamment. L’innovation c’est évidemment inventer un nouveau dispositif. Mais c’est aussi pour chacun de nos salariés la possibilité de proposer des améliorations au sein de l’établissement dans lequel ils travaillent. Et pour celles et ceux qui ont l’âme d’un entrepreneur social nous avons créé depuis plusieurs années un programme d’intrapreneuriat, pour que le groupe puisse accompagner toute bonne idée issue du terrain dans sa transformation en une activité pérenne et impactante.

Comment définiriez-vous l’impact social et l’impact sociétal des entreprises ?

Les entreprises doivent prendre en compte l’ensemble de leur impact sur la société. Trop longtemps la rentabilité et les indicateurs financiers étaient la seule boussole des entreprises. C’est en train d’évoluer. Comment vont mes salariés ? Comment je me comporte avec mes clients, avec mes sous-traitants ? Quelles sont les conséquences environnementales de mes activités ? Autant de questions par exemple qu’un dirigeant d’entreprise ne peut plus ignorer. C’est aussi une question de survie sur le long terme car les consommateurs et les salariés choisiront les entreprises les plus vertueuses.  

Nous venons d’ailleurs de créer un Think and Do Tank (“impact Tank”) en lien avec le monde académique notamment, pour évaluer précisément l’impact social et environnemental des initiatives exemplaires et ainsi faire en sorte qu’elles soient dupliquées plus facilement.

Quels sont les prochains champs que souhaite adresser le Groupe SOS ?

En ce moment le groupe est très investi dans le développement du projet 1000 cafés qu’il a lancé en fin d’année dernière. L’idée est de créer ou recréer 1000 cafés dans des petites communes rurales. Des cafés qui seront aussi des lieux multiservices : vente de produits locaux, point d’accès internet, relai poste, librairie, bibliothèque, office du tourisme… Les possibilités sont nombreuses au sein d’un café pour redonner vie au territoire.

Sinon pour l’avenir je ne sais pas, nous allons justement très bientôt réfléchir collectivement à notre stratégie à venir pour les 5 prochaines années. Nous ne nous interdisons rien, tant qu’il s’agit de servir l’intérêt général. Pour ma part j’aurais tendance à pousser le sujet de l’enseignement. Nous gérons déjà un diplôme universitaire avec Dauphine, nous formons une vingtaine de futurs cadres dirigeants des entreprises sociales. Nous gérons aussi un lycée professionnel qui forme notamment aux métiers de l’agroécologie. Sans doute qu’un groupe comme le nôtre peut aussi contribuer à la réflexion sur l’enseignement pour les plus jeunes. On sait que beaucoup de choses se jouent au plus jeune âge : comment permettre aux adultes en devenir, et notamment les plus vulnérables d’entre eux, d’avoir confiance en eux, confiance dans les autres, d’être capable de s’adapter dans un monde qui on le sait va subir de nombreuses mutations pendant ce 21ème siècle. 

De quelle manière le Groupe SOS s’engage sur la thématique environnementale et notamment les enjeux de développement durable ?

Depuis 15 ans nous avons un cabinet de conseil (Auxilia conseil) qui accompagne collectivités et entreprises dans la transition sociale et écologique. Et puis un secteur transition écologique est né en tant que tel au sein du groupe il y a cinq ans. Nous accompagnons des exploitations agricoles dans cette transformation aujourd’hui indispensable. Nous développons des « brigades nature » qui créent de l’emploi sur les territoires pour des personnes en difficulté grâce à des activités de valorisation de l’environnement. Nous sommes aussi le 5ème réseau d’aide alimentaire en France via le réseau ANDES qui accompagne près de 400 épiceries alimentaires en luttant contre le gaspillage alimentaire. Blue Bees enfin permet à chacun de contribuer au développement de projets agroécologiques grâce au crowdfunding ou au crowdlending. Nous coordonnons aussi des projets de reforestation avec la plantation de millions d’arbres en France et dans le monde.  

Nous avons créé KeekOff sur la base de ce constat que nous partageons. La prochaine transformation se doit d’être une transformation durable incluant toutes les parties prenantes et les entreprises ont un rôle très fort à endosser. Nous avons la conviction que l’engagement de chacun contribue au changement. Nous pensons que l’intégration dans la culture d’entreprise des valeurs de durabilité, de diversité et d’inclusivité est essentielle.

Quels sont, selon vous, les grands défis pour les entreprises que nous réserve 2021 ?

Il va sans doute falloir réinventer les modèles économiques dans bon nombre de secteurs d’activité. Il va falloir être inventifs, coopératifs et même solidaires.

Les conséquences de la crise actuelle seront encore présentes en 2021, pour certaines activités plus que d’autres, mais c’est bien une crise globale qui nous touche toutes et tous. Toutes les entreprises, mêmes celles qui sont moins touchées, doivent se remettre en question. Cette crise met en exergue notre fragilité. On doit arrêter de jouer avec la santé de notre planète, car en fait c’est avec notre santé que nous jouons. Cette crise comme toutes les crises risque d’accroître encore les inégalités. Quel écart doit-il y avoir entre le plus gros et le plus petit salaire au sein d’une entreprise ? Quelle doit être l’implication de l’entreprise au sein de son territoire, en plus ou en complément de son activité purement business ? Quelle redéfinition de la relation entre l’entreprise et ses salariés, dont le télétravail n’est que le petit bout de la lorgnette ? Autant de questions qui seront sans doute très présentes en 2021 mais qui risquent de nous accompagner bien au-delà.    

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